L'import-export présenté, expliqué et commenté, .....Economie, fiscalité,propriété intellectuelle, normes

Ce blog consacré pour l'essentiel à la présentation de l'import-export ainsi qu’à l’actualisation du livre L'import-export présenté, .. s'adresse aux professionnels concernés et à toute personne intéressée, sans se substituer aux textes applicables ni aux conseils et à ces professionnels qui demeurent en toute hypothèse les sources privilégiées d'information et intervenants référents. Jean Sliwa

Evasion, optimisation et politique fiscales (2)

Présentation et définitions

L’évasion, sans la fiscalité, se définit en partie par le Larousse comme l'«Action de se soustraire à l'emprise de quelque chose, à la monotonie, à la fatigue de la vie quotidienne » (http://www.larousse.fr/).

Dans un contexte fiscal, communément et pratiquement, elle se décrit comme le transfert de revenus et bénéfices dans des pays de l’Union européenne, dans des pays tiers, paradis fiscaux ou non, à fiscalité réduite ou nulle, pour bénéficier de ces avantages fiscaux. En se défaisant souvent de cette emprise du pays de départ.

Cette définition basique ressort entre autres sources, fiscales notamment, de rapports publics, émanant notamment de parlementaires, très documentés, pertinents, assortis de nombreux exemples et de cas d’espèce, auxquels nous allons nous référer.

Le premier de ces rapports du 17 juillet 2012 a été rédigé au nom de la commission d'enquête sur l'évasion des capitaux et des actifs hors de France et ses incidences fiscales par le sénateur Éric Bocquet.

Ce rapport - de 860 pages en format PDF consultable sur le site https://www.senat.fr/, met tout d’abord en évidence que : «l’évasion fiscale et la « fuite fiscale », si elles ont des racines communes, - l’hétérogénéité fiscale du monde contemporain – ne sont pas un seul et même phénomène ». Et que le flou entourant la notion d’évasion fiscale, il est souhaitable, que celui-ci soit dissipé car « Il en va de la précision du propos et de la justesse et de l’efficacité non seulement des décisions individuelles de l’administration fiscale et des juges mais encore de notre politique de lutte contre l’évasion fiscale et, au-delà encore, sans doute, de notre politique fiscale ».

Il définit ainsi dans cet extrait son contenu :

« Prise dans un sens non technique, l’idée d’évasion fiscale recouvre une multitude de phénomènes qui manquent profondément d’unité : l’exil fiscal, la délocalisation fiscale, la gestion astucieuse d’une situation fiscale… L’unité n’est alors pas dans le phénomène, elle se trouve dans un sentiment diffus de réprobation.

Prise dans un sens plus technique, l’évasion fiscale est marquée par l’origine fiscalo-juridique des conceptions par lesquelles on l’envisage dans notre système juridique. Elle est de ce fait indéterminée puisque considérée comme un phénomène général pouvant relever de la saine et habile optimisation d’une situation fiscale, réservée par le principe de « libre choix de la voie la moins imposée », ou, au contraire, devant être rangée dans le champ de l’illicite. Si aucune de ces deux approches n’est complètement récusable, aucune d’entre elles n’est vraiment satisfaisante. C’est pourquoi le présent rapport s’en écarte, considérant que son objet doit répondre à une conception de l’évasion fiscale précise mais plus large que celle que notre système fiscalo-juridique comporte. Cela demande, sinon un complet renouvellement, du moins un effort pour mieux tenir compte de la dimension éminemment économique d’une notion dont la nature s’échappe quand on l’aborde selon l’angle traditionnel, celui du seul droit ».

Le deuxième est un rapport d’information sur l’Union européenne et la lutte contre l’optimisation fiscale[1], de 2015, des députés Isabelle Bruneau et Marc Laffineur, qui considèrent que si l’optimisation agressive et l’évasion fiscales sont légales, elles ne s’inscrivent pas dans l’esprit de la loi : « car elles s’appuient sur une interprétation très extensive de ce qui est légal pour réduire au minimum la contribution fiscale d’une entreprise, faussant ainsi le lien entre taxation et lieu de la création de valeur économique ».

De fait, ajoutent-ils : «De telles pratiques constituent un obstacle au partage équitable de la charge entre les contribuables, à l’exercice d’une concurrence loyale entre les entreprises et à l’instauration de conditions égales pour tous les États membres en matière de collecte de l’impôt sur les bénéfices ».

Avec les risques selon les auteurs, de voir se développer des frustrations dans nos populations, et par conséquent la montée des populismes. D’où cette conclusion : «Les exigences de la solidarité européenne rendent donc irrecevable l’argument de l’avantage comparatif développé par des États comme l’Irlande ou le Luxembourg (une fiscalité avantageuse étant vue comme le seul moyen de compenser leur handicap relatif) ».

Le troisième, qui se distingue des précédents dans son objet, est un rapport d’information[2] portant plus précisément sur les opérations réalisées par les entreprises dans un contexte international, présenté par le député Pierre-Alain Muet, le 10 juillet 2013.

Ce rapport définit l’optimisation, qui constitue la conséquence de l’évasion, le but recherché : «Enfin l’optimisation fiscale – ou planification fiscale[3] – peut se définir comme l’utilisation par le contribuable de moyens légaux lui permettant d’alléger ses obligations fiscales. Elle traduit l’habileté du contribuable à tirer le meilleur parti des dispositions fiscales applicables dans son État d’imposition mais aussi, le cas échéant à l’étranger, en les combinant, en jouant de leurs contradictions et de leurs ambiguïtés afin de réduire l’impôt dû. L’ingéniosité fiscale des contribuables n’est alors pas répréhensible dans la mesure où elle s’inscrit dans le cadre strict de la réglementation en vigueur ».

Quant au quatrième de ces rapports, il témoigne de la politique mise en œuvre par l’état français pour promouvoir l’attractivité de notre pays, et favoriser l’exportation, moyennant entre autres mesures l’octroi d’avantages et d’aides notamment. Consultables sur le site http://www.businessfrance.fr/, ces rapports/bilans des années écoulées[4] très instructifs aident à comprendre le fonctionnement du système dans son ensemble et pourquoi et comment, des entreprises étrangères de production, de distribution, des centres de décision, de recherche-développement, d’ingénierie, investissent en France, délocalisent en quelque sorte.

Revenons à l’évasion fiscale proprement dite pour préciser qu’il est généralement admis, qu'au sens strict, elle n’emporte pas de changement de domicile vers l’étranger, ni par conséquent une délocalisation. Et ne doit donc pas être confondue avec l’expatriation fiscale, ni avec la délocalisation fiscale et encore moins avec l’implantation/création d’entreprise à l’étranger.

Bien que ces opérations aboutissent au même résultat – et plus encore - pour l’expatriation et les délocalisations par rapport à l’évasion proprement dite.

Le constat est en tout cas unanime : l’évasion fiscale est une expression qui manque de clarté, relativement floue, qui mélange les genres, à savoir l’application légale, limite parfois, de la réglementation et la fraude, d’où l’intérêt de tirer les choses au clair, comme le préconisent le plus souvent les rapports.

Ce à quoi répond cette définition qui pourrait être retenue, fondée sur les textes et les réalités économiques et fiscales, qui décrit l’évasion fiscale comme étant une action (un transfert, un placement, un achat, une création, etc.) permettant aux entreprises et aux particuliers de bénéficier légalement des avantages fiscaux offerts sur le territoire national et/ou à l’étranger, dans le cadre des objectifs poursuivis (relance de l’emploi, augmentation des investissements, implantations de sociétés étrangères, des sièges sociaux, etc.), par les gouvernements, les autres institutions représentatives et par délibérantes (Parlement, conseils, …).

Ce qui en exclue les irrégularités constitutives d’infractions punissables, modérément pour celles ne relevant pas de la fraude (cas des omissions formelles, de l’application erronée sans incidence, etc.) ou plus sévèrement pour celles qui en relèvent (faits caractérisés commis intentionnellement). L’abus de droit fiscal prévu à l’article L64 du Livre des procédures fiscales pouvant s’appliquer dans les autres cas.

Une définition qui se rapproche de la description de l’optimisation et dans sa deuxième partie de celle du site https://fr.wikipedia.org/ : « L'évasion fiscale est techniquement définie comme l'ensemble des comportements du contribuable qui visent à réduire le montant des prélèvements dont il doit normalement s'acquitter1…….l'évasion fiscale est alors synonyme d’évitement de l’impôt y compris en restant dans son pays, par exemple par l'exploitation de niches fiscales, de l'optimisation fiscale ou, en droit américain, de tax avoidance 2.

 

[1] Déposé par la Commission des affaires européennes sur l’Union européenne le 6 octobre 2015

[2] Rapport fait au nom de la Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

[3] En anglais tax planning, voire aggressive tax planning

[4] Le bilan 2016 est à paraître, celui de 2015 y est présenté.

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merci
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